Les chiffres sont enfin tombés. 119 suppressions de postes dans le Second degré pour l’académie de Caen, 13 chez les personnels administratifs, 3 chez les personnels de direction. Le document du CT académique précise enfin les choses. En effet, le ministre n’avait eu le courage d’annoncer “que” 78 postes supprimés pour les enseignants, tout en annonçant vaguement des transformations de postes en HSA, sans plus de précision. Les documents rectoraux font le point : 41 postes transformés en HSA ! A ajouter évidemment aux 78. 119 en tout donc.

Ainsi, pour une perte de 424 élèves dans le second degré, on supprime, presque 120 postes, avec certes un retour d’un tiers des heures perdues sous forme d’heures supplémentaires.

La saignée est forte. “Saignée”, car si cela ne met pas en danger de mort l’Education nationale dans l’académie, on affaiblit réellement ses capacités, en particulier face à l’enseignement privé. “Saignée” aussi car, comme à l’époque de Molière, où les médecins pensaient qu’un tel remède permettait de soigner le corps (ici les finances publiques), ces pratiques sont en fait inefficaces et dangereuses pour l’avenir.

Effectifs élèves (la dernière colonne donne l’évolution pour la rentrée prochaine)

Les collèges, qui perdent 69 élèves, vont perdre 45 postes, dont 29 sont redonnés en HSA. La Manche surtout perd des postes (21.5), devant l’Orne (12 postes) et le Calvados (11.5 postes). Pourtant, seule l’Orne perd des élèves à la rentrée prochaine. Ces choix sont pour l’instant à comprendre.

Les lycées GT, qui perdent 289 élèves, vont perdre 55 postes, dont seulement 10 sont redonnés en HSA. Cette disproportion peut s’expliquer par le fait que la réforme du lycée va se mettre en place l’année prochaine et que, pour éviter de rajouter à la tension actuelle sur les équipes, le rectorat voudrait limiter les pertes sèches de postes. Le collège paiera ainsi la réforme du lycée !

Les lycées pro, qui perdent 133 élèves, perdront 14,5 postes, dont 1.5 récupéré en HSA. L’analyse ci-dessus peut être aussi reprise ici.

13 postes administratifs sont aussi supprimés, dont 4 au rectorat.

Certes l’académie perd des élèves, et on peut comprendre que le nombre de postes se réduise en conséquence. Cependant, la perte est bien plus conséquente, en particulier à cause de la transformation des heures postes en heures supplémentaires. Il s’agit de mettre en place la promesse du candidat Macron de supprimer 120 000 postes de fonctionnaires, dont 50 000 dans la fonction publique d’Etat, et l’académie y participe pleinement. Pourquoi les supprimer ? C’est une promesse de campagne, il faut donc la mettre en place. Est-ce que cette promesse est justifiée sur le terrain, va-t-elle améliorer le fonctionnement du service public, ou au moins ne pas le dégrader ? Ce n’est pas le problème : il faut appliquer les promesses !

Encore mieux, il faut faire passer ces suppressions pour un plus auprès des Français. Le ministre explique que ces suppressions (pour les enseignants) sont en partie compensées par la création d’heures supplémentaires et que donc les enseignants seront mieux payés globalement. Officieusement, il s’agit aussi de faire passer l’idée qu’ils vont travailler plus, car chacun sait qu’entre leurs semaines à 18h de travail et leurs 15 semaines de vacances, les profs ne font pas grand chose ! Ce n’est pas dit, mais on le sent en filigrane dans le discours du ministre. Le fonctionnement médiatique est fait aujourd’hui de telle manière qu’il suffit d’affirmer avec aplomb sur les chaines de radio ou d’info télé quelque chose pour que cela devienne une vérité.

Nous aurons donc plus d’élèves dans les classes, et moins d’adultes en général dans les établissements. Car une partie des heures de présence sera faite sous forme d’heures supplémentaires. Pour permettre aux chefs d’établissement “d’écouler” cet afflux d’HSA, le ministre vient de confirmer qu’il permettra d’imposer deux heures supplémentaires. Cette nouveauté n’a aucun intérêt pour les personnels. Ceux qui voulaient prendre plus qu’une HSA, et qui en avaient la possibilité, avaient le choix de le faire. Imposer une seconde heure signifie bien que le ministre sait que les personnels n’ont pas envie de prendre plus d’heures supplémentaires : il s’agit de “mettre les profs au travail”. Une idée que le ministre a gardé de son passage à la tête de la DGSECO sous Nicolas Sarkozy.

Pour faire le bilan, l’Education nationale dans l’académie va donc faire les frais de l’application de promesses électorales faites il y a deux ans sans lien avec la réalité du service public sur le terrain, avec un ministre qui essaye de faire croire le contraire à l’opinion publique, tout en se méfiant et en méprisant les personnels de son ministère.

 

Documents du rectorat :

Postes premier degré

Postes Second degré

Postes administratifs et personnels de direction