Plusieurs syndicats ont appelé à une grève contre la réforme du lycée, le 17 juin, jour de l’écrit de philosophie et médiatiquement, le “premier” jour du bac.
L’idée court depuis plusieurs mois et a fait débat.
Du côté “pour”, il y a évidemment l’efficacité supposée d’une telle action. Massivement suivie, elle signifierait d’une part que le ministre Blanquer ment depuis des mois en disant que les enseignants soutiennent sa réforme ; les parents tiendraient d’autre part ledit ministre pour responsable d’un dysfonctionnement majeur du bac.
Du côté “contre”, il y a d’abord l’intérêt des élèves. Même si pour certains la menace d’une grève suffira à faire fléchir le ministre, la tension sera grande pour des lycéens déjà sous pression de leur orientation. Les plus touchés seront évidemment les plus fragiles. Beaucoup de collègues considèrent que la fin ne justifie pas les moyens, et que l’on touche ici à leur raison d’être : la réussite des élèves. Préparer les lycéens à des épreuves du bac et finalement leur annoncer que, pour la bonne cause, ils ne pourront pas mettre en oeuvre ce pour quoi ils travaillent depuis des mois, cela est difficile pour beaucoup.
Il y a aussi un aspect efficacité dans le “contre”. Ou plutôt contreproductif. Non suivie massivement (ce qui a été le cas de tous les appels sur ce sujet depuis un an), cette grève donnera raison au ministre : peu de profs sont prêts à se mobiliser. De plus, dans l’hypothèse où le ministre reculerait, il semble terriblement difficile de commencer une nouvelle préparation de rentrée. Les élèves seraient à réorienter selon les voeux des familles ; les moyens seraient à redistribuer ; le mouvement des enseignants serait à refaire. Il est improbable que toute la préparation de rentrée dans les lycées puisse être recommencée en quelques semaines.
Enfin, revenir au système actuel, unanimement critiqué, ne serait pas plus satisfaisant.
Devant la perspective d’une action qui visiblement ne mobilisera pas massivement, le SGEN-CFDT a donc décidé de ne pas appeler à la grève le 17 juin.
Que faire donc ? Accepter la réforme ? Ce n’est pas possible : en effet, cette réforme du lycée est incohérente, inapplicable et au final aura des effets inverses à ceux que le ministre met en avant. Toutes les organisations syndicales et une grande majorité de collègues y sont opposés. Les programmes imposés sont une régression, un retour en arrière. Beaucoup sont irréalisables. Le choix des spécialités, présenté comme totalement ouvert, se révèle en fait limité faute de moyens : on ne peut choisir que ce qu’il y a dans son lycée de secteur, et avec un nombre de combinaisons limitées. De plus, les choix de fin de seconde vont visiblement impacter directement les possibilités de choix d’orientation en fin de terminale. Et ce ne sont pas seulement les enseignants qui le dénoncent : les chefs d’établissement et les inspecteurs sont majoritairement opposés à cette réforme.
Mais encore une fois, alors, que faire ? Tout annonce que la mise en oeuvre de la réforme va très vite montrer ses défauts majeurs. Le ministre devra l’année prochaine répondre de ces dysfonctionnements. Certes il n’assumera rien, comme d’habitude, mais on peut considérer que le sujet est déjà largement présent dans les médias et que les parents ne seront pas dupes. L’enjeu est important pour le ministre Blanquer, car la réforme du lycée est une promesse présidentielle. Son bilan sera un élément important pour la réélection éventuelle de notre président …
Il va donc être nécessaire de montrer ce qui ne marche pas. Le refus d’être professeur principal l’année prochaine, proposé dans les établissements de l’académie, est une première étape.