Encore une fois, avec l’aggravation de la crise sanitaire, on nous somme d’avoir l’air d’être prêts à faire face !
Et nous en avons assez de faire semblant.
Nous sommes las de devoir appliquer des mesures sans disposer en parallèle d’un argumentaire sérieux et cohérent justifiant leur mise en place : objectifs sanitaires poursuivis ? rôle spécifique de chaque mesure prise dans la lutte contre la propagation du virus ? solutions matérielles pour appliquer les mesures, palliatifs éventuels lorsque ce n’est pas possible à priori.
Au lieu de cela, nous sommes amenés à deviner nous-mêmes la logique intrinsèque censée donner une cohérence à l’ensemble des mesures préconisées. Il n’est donc pas étonnant que certains parmi nous, faute d’en trouver une, préfèrent jeter l’éponge et abandonner quelques préconisations…
Une mesure inexpliquée : le port du masque dès 6 ans.
Depuis le mois de juin, celui-ci n’était pas conseillé. Là encore, peu d’explication… mais nous étions nombreux à penser que compte-tenu du fait que le virus circulait très peu chez les enfants de moins de 11 ans et qu’ils étaient peu « contaminants » (d’après les informations qu’on pouvait trouver ici ou là, notamment une étude de l’institut Pasteur effectuée en février mars 2020 sur le cluster de Crépy en Valois), et que d’un autre côté, le port du masque n’était pas propice à une communication optimale, cette « non-préconisation » pouvait se justifier ainsi.
Au contraire, comme chacun le sait, le protocole du 2 novembre rend obligatoire le port du masque. Et comme précédemment, l’introduction relative au contexte, fort sommaire, n’apporte aucun élément d’explication (sauf cette précision : le protocole repose sur l’avis du Haut Conseil de la Santé Publique du 17 septembre, complétant celui du 7 juillet, qui ne dit rien à ce sujet). Est-ce aux enseignants de trouver la logique générale ? ou bien ne sont-ils bons qu’à appliquer des consignes sans se poser de questions ?
La première des solutions laisse la place à toutes les conjectures… quant à la seconde, elle est inacceptable : on ne peut évidemment pas d’un côté apprendre à nos élèves le raisonnement logique et d’autre part s’interdire toute réflexion sur notre propre action !
En attendant des clarifications, c’est notre crédibilité et celle de notre institution qui est interrogée…
Nous avons besoin d’une boussole si nous ne voulons pas passer pour des girouettes !
En effet, sur le terrain, les directrices/directeurs, adjointes/adjoints doivent expliquer les revirements, et ce n’est pas simple puisqu’on n’a pas d’explication…
Et la distanciation ?
Rien de nouveau en novembre : certaines classes trop chargées actuellement l’étaient déjà en septembre. « Si la configuration des salles de classe (surface, mobilier, etc.) ne permet absolument pas de respecter la distanciation physique d’au moins un mètre, alors l’espace est organisé de manière à maintenir la plus grande distance possible entre les élèves. »
Le ministère a-t-il vraiment envisagé toutes les solutions pour pallier les difficultés rencontrées maintenant ?
Non, et c’est la raison pour laquelle le protocole ne préconise rien de précis dans ce cas. Pourtant, dès la reprise de juin, nous étions conscients des difficultés que nous rencontrerions si une deuxième vague se profilait.
C’est à ce moment, quand il était encore possible d’anticiper, qu’il aurait fallu se mettre autour de la table, notamment avec les collectivités locales, pour évaluer les moyens en locaux (dans le but de dédoubler les classes les plus chargées) et en personnel (enseignants remplaçants, trop rares … animateurs, agents) permettant la mise en place dans certains cas d’un enseignement hybride.
Il n’est d’ailleurs pas trop tard pour le faire, car la crise sanitaire est loin d’être finie.
Il faut donc sortir de la dictature de l’urgence, qui au lieu de déboucher sur une politique éducative solide, n’aboutit qu’à des coups de communication et de l’affichage clinquant. Bref, s’engager dans le long terme et donner à notre école un budget digne d’un pays de l’OCDE (la France consacre 6.7 % du PIB à son école quand les autres membres de l’OCDE y mettent en moyenne 7.5 %).