Si, aujourd’hui, le SGEN Basse-Normandie fait une déclaration liminaire en CAPA des PLP, c’est parce que la situation du mouvement et, plus globalement, de notre métier, nous paraît inquiétante. Chacun aura constaté que le mouvement des PLP dans l’académie est de plus en plus difficile chaque année. Plusieurs facteurs nous permettent de penser que la situation va empirer encore, jusqu’au blocage. De plus, la réforme de la voie professionnelle amplifie les inquiétudes des collègues vis-à-vis des suppressions de postes, parfois de manière disproportionnée, mais pas sans raisons, nous y reviendrons.
Certes, nous entendons les raisons démographiques indéniables qui expliquent une partie des suppressions de postes dans le secondaire au niveau académique. Mais premièrement, une grande partie de ces suppressions (un tiers !) sont dues à la volonté du ministre d’imposer aux enseignants une deuxième heure supplémentaire, avec une argumentation démagogique dont le seul but est de flatter un électorat qui méprise les enseignants. Et deuxièmement, la baisse démographique ne pouvait-elle pas être utilisée comme une opportunité d’améliorer les conditions d’enseignement en allégeant les effectifs par classe ou en augmentant les dédoublements ? La réalité du terrain est globalement l’inverse, au mépris total des enseignants, des parents et des élèves. Dans notre académie, pour une perte de 424 élèves dans le second degré, 119 postes ont été supprimés, dont 41 sont des postes transformés en HSA. La réponse du ministre au malaise de l’éducation nationale est donc la saignée, dont on sait pourtant qu’elle ne guérit jamais, mais empire l’état du malade.
En lycée professionnel, les suppressions sont moins catastrophiques dans l’académie que pour les collèges par exemple, mais elles n’améliorent pas une situation déjà tendue en terme de mouvement et d’encadrement dans certains établissements : pour une perte de 133 élèves, 14,5 postes ont été supprimés, dont 1.5 transformé en HSA. En passant, nous nous interrogeons sur la volonté et tentative récente de la division des moyens académique de transformer les heures de décharge de certains délégués syndicaux en HSA, ce qui est inadmissible puisqu’il s’agit d’heures postes. Appliquerait-on une gestion purement comptable sans se préoccuper des conséquences ?
Au niveau national, l’annonce cette année d’une réduction de près de 40% des postes proposés au concours en lettres-histoire et de 50 % en lettres-anglais et lettres-espagnol nous semble indiquer que les matières littéraires, essentielles pour la culture de nos élèves, seront touchées particulièrement avec la mise en place de la réforme du lycée professionnel, malgré l’augmentation importante des heures complémentaires négociée par les syndicats réformistes, dont le SGEN. En effet, malheureusement, malgré nos propositions, l’enveloppe d’heures complémentaires ne compense pas intégralement la baisse des heures disciplinaires.
L’absence de fléchage (au moins facultatif) de ces heures complémentaires, laissé au bon vouloir du chef d’établissement semble aggraver le problème. La répartition de ces heures se fait malheureusement dans nombre de LP ou SEP au détriment des matières générales et au profit des matières professionnelles, certes parfois pour sauver des postes menacés, ce qui crée des concurrences et des dissensions entre matières et au sein même des équipes, alors même que la réforme est censée promouvoir la cointervention, l’interdisciplinarité, les projets d’équipe. Vains mots devant le rouleau compresseur des économies budgétaires… Pour mener une politique éducative ambitieuse, il ne suffit pas de la décréter, il faut vraiment engager les moyens qui vont avec : heures postes, heures de formations…
Les réductions de postes vont être aggravées par la réforme de la filière GA. Dans l’académie, non seulement une vingtaine de collègues enseignant la matière vont être impactés d’ici 2021, mais n’en doutons pas, aussi des collègues de matières générales puisque les fermetures de sections ne seront pas compensées partout. Le SGEN Basse-Normandie demande donc que les fermetures de section GA soient compensées par des ouvertures dans d’autres filières et que les collègues de GA soient accompagnés pour anticiper leur évolution de carrière. Le rectorat a décidé de recevoir les collègues à la rentrée. Nous prenons acte de cette bonne nouvelle.
Il est temps aussi que l’institution considère véritablement les PLP comme des enseignants au même niveau que les autres certifiés, qui peuvent accomplir une partie de leur service, voire nous espérons un jour leur service entier, sur le LGT, sur les BTS comme la loi les autorise déjà. Cela permettrait plus de souplesse dans le mouvement. Comme chacun le sait, le SGEN revendique depuis toujours la fin de la ségrégation entre corps et la possibilité pour chacun de choisir ce qui lui convient.
Nous sommes particulièrement inquiets pour le mouvement des prochaines années, car n’oublions jamais que derrière les dossiers de mutation, derrière les mesures de cartes scolaires, derrière le statut de TZR imposé, il y a des êtres humains qui vivent parfois des situations difficiles, au niveau familial ou par rapport à la fatigue liées aux déplacements et aux conditions de travail qu’ils n’ont pas choisies. On ne peut plus penser que les situations compliquées sont provisoires, car elles s’installent sur la durée, sur de nombreuses années voire sur la carrière, au fur et à mesure que les postes fixes permettant le mouvement deviennent inexistants. Elles deviennent aussi plus fréquentes. Il y va de la santé morale et physique de certains collègues. Ces situations accroissent la défiance, parfois la colère, qui s’installent également de façon durable chez les personnels à l’égard de l’institution. C’est pourquoi nous demandons dès cette année une grande bienveillance et une capacité d’adaptation des règles (par exemple concernant les ZR) pour régler ces situations difficiles.
Pour conclure, la vraie école de la confiance, c’est le dialogue, la négociation, l’échange, l’écoute, la liberté d’expression et la liberté de choix pour les personnels, dont la possibilité de mutation fait partie. Sinon, ce n’est qu’un slogan vide de sens. Le ministre doit accepter de revoir la copie de ses réformes destructrices de postes dans le secondaire et venir à la table des négociations avec les représentants du personnel de l’éducation nationale, plutôt que de leur opposer le mépris ou de vouloir saboter avec sa majorité les institutions représentatives comme le prévoit la réforme de la fonction publique, institutions dont nous, représentants ici présents, connaissons l’utilité en terme de dialogue social.