Pour commencer, nous tenons à répéter devant vous, Madame la rectrice, la satisfaction que nous avons à constater que le dialogue social a bien évolué ces derniers mois. Il y a moins d’un an, nous dénoncions l’abandon du dialogue social par l’administration rectorale. Les groupes de travail tenus à Pont-Audemer en janvier 2020 avaient donné lieu à un dialogue de sourds autour de projets dont l’origine ministérielle semblait faire de toute proposition de modification un sacrilège.

Cette fois-ci, nous avons pu discuter sur le fond et pas seulement sur la forme. Plusieurs propositions ont été reprises. Ce qui ne l’a pas été constitue un désaccord, mais chacun a pu justifier sa position avec des arguments et non des dogmes.

Nous espérons que les groupes de travail qui se dérouleront l’année prochaine dans le but d’harmoniser les mouvements, ne se feront pas « par le bas », et que les organisations syndicales seront toujours écoutées.

Les LDG dans leur nouvelle version, avec des annexes qui précisent pour chaque corps et périmètre le détail des procédures, ont l’avantage de mettre les choses à plat. Elles constituent un regroupement relativement facile d’accès mais surtout à jour.

Elles permettent aussi de mettre en lumière des oublis ou des différences de traitement. Des « trous dans la raquette » comme on dit parfois.

Ainsi les contractuels sont oubliés. Alors qu’ils représentent une partie non négligeable des personnels, les règles de gestion ne sont souvent pas facilement accessibles à ces collègues.

Nous redemandons, comme l’année dernière, que des LDG soient écrites pour ces personnels, et que ce soit là l’occasion de repenser entièrement cette gestion. On pourrait ainsi constater que les personnels contractuels sont traités de façon inéquitable : les contractuels administratifs n’ont pas de progression de carrière par exemple, alors que les enseignants/CPE/PsyEN ont pu eux en avoir une après plusieurs décennies de demande.

Nous demandons aussi que des règles d’affectation soient créées pour les personnels MLDS. Demandées par les collègues, elles sont pensées comme nécessaires. Leur absence crée du conflit, du ressentiment, voire du désespoir. Une collègue en congé longue maladie parce qu’elle pense qu’elle a été traitée injustement : comment la convaincre du contraire puisqu’aucune règle n’existe !

On constate aussi des inégalités de traitement dans les LDG actuelles :

Ainsi, on demande aux personnels ATSS de rester trois ans en poste. Certes ce principe n’a pas un caractère absolument obligatoire ; et l’administration rectorale ne le fait pas sans avancer de raison : elle met en avant la nécessité d’une continuité du service et d’une adaptation au poste qui doit être rentabilisée. Cependant, ce principe n’existe pas pour les personnels enseignants, il n’est jamais mis en avant. Et il faut ignorer qu’une bonne partie des postes subit un changement annuel de titulaires quand ils sont occupés par des contractuels. Ce principe a aussi pour conséquence que des personnels peuvent se retrouver bloqués longuement loin de chez eux ; pire : ne pouvant bouger pendant trois années, ils voient se libérer sous leur nez des postes proches de leur domicile qu’ils ne peuvent pas demander ! Qu’est-ce qui pourtant est le mieux ? Un poste occupé par un collègue qui vit difficilement un « exil » imposé et qui n’a qu’une hâte : partir ? Ou un poste occupé par un collègue qui doit se former mais qui veut rester ?

Autre différence de traitement : les congés parentaux. Pour les enseignants du second degré, ce droit familial est relativement facilement accessible, puisqu’aux trois ans de son enfant, on retrouve le poste que l’on a quitté. Pour les ATSS par contre, vouloir prendre du temps pour élever ses enfants est beaucoup moins évident, car on perd son poste. Et on ne sait pas ce que l’on récupèrera à la place. Une absence remplacée par un personnel contractuel durant deux ans et demi permettrait pourtant de mieux rentabiliser l’adaptation audit poste !

Rappelons également la contradiction persistante entre un des objectifs des LDG, qui est de favoriser la mobilité des parcours professionnels, et les règles de mouvement : ainsi peut-on lire la volonté « d’accueillir au sein de l’éducation nationale des fonctionnaires d’autres fonctions publiques (de l’État, de la fonction publique territoriale ou hospitalière) » mais ne plus prendre en compte l’ancienneté générale des services de ces personnels lorsqu’ils arrivent dans l’Education Nationale !

Nous souhaitons également attirer votre attention sur la multiplication des postes à profil : ceux-ci ne doivent pas concerner des postes peu attractifs, qui risquent de rester vacants et d’être donnés à titre provisoire à des débutants, nous prendrons pour exemple les GS-CP et CE1 dédoublés qui sont peu attractifs en raison de l’exigence et du suivi pédagogique liés à ce type de poste. Les postes à profil doivent donc être limités à des postes très particuliers et attractifs.

Pour terminer, revenons encore une fois, et après d’autres, sur la grande difficulté que l’administration aura à être crédible sur l’équité des opérations. La « transparence » proclamée dans l’introduction des LDG disparaît totalement quand on rentre dans le détail des opérations. Et ce pour une raison simple : il faudrait que chacun, ou du moins une autorité extérieure, puisse vérifier l’ensemble des opérations. Pour l’instant, clamer cette transparence comme une vérité non contestable fait surtout penser à une réalité alternative, ou à la méthode Couet.

Certes les postes seront publiés cette année dans le second degré. Certes un retour des dossiers individuels est fait auprès des collègues. Certes aussi, les représentants du personnel que nous sommes savent que les services sont efficaces et respectent les règles. Parce qu’ils ont pu pendant longtemps le vérifier lors des CAP et FPMA. Mais dans les prochaines années, quand ce souvenir se sera estompé, qui pourra affirmer aux collègues que l’administration respecte les règles qu’elle publie ? Que personne n’a été lésé ?

Il n’y a que votre affirmation, Madame la rectrice, que tel est le cas. Penser que cela suffira relèverait du déni de réalité ou d’une coupure profonde avec cette réalité. La tour d’ivoire est-elle en train de se construire ? Peut-être. L’évolution récente du dialogue social académique montre que les choses peuvent changer en bien. En attendant qu’un ministre se rende compte des dégâts, il est nécessaire, Madame la rectrice, que la défiance ne s’installe pas en Normandie entre les personnels et leurs représentants d’un côté, et les services de l’autre.